Pierre Boisseaux "l'interview"

1/ Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Pierre Boisseaux, je vis en Belgique. Je suis photographe de paysage naturel et urbain en plus d’animer une chaîne Youtube consacrée à la photographie depuis 2015. La photo m’a toujours attiré, dès le plus jeune âge.

2/ Tu as essayé beaucoup de styles de photos, qu’est ce qui t’a attiré à te spécialiser à la photo de paysage ?

La photographie a rarement été le but final pour moi. Je me suis toujours servi de ce média pour me dépasser. J’ai commencé par le portrait car j’étais une personne très introvertie, je me suis ensuite dirigé par le mariage et l’événementiel. Depuis 2019, je me suis tourné vers le paysage car je ressentais le besoin de découvrir des endroits atypiques. Une symétrie entre deux bâtiments, un espace naturel magnifique, un simple coucher de soleil sur un champ,.. toutes les occasions sont bonnes pour partir à la découverte du monde !

3/ L’urbex est une expérience ou une découverte ?

L’urbex est une magnifique expérience de découverte ! Partir à la rencontre de ces endroits abandonnés depuis des années (si pas plus !) procure des souvenirs inoubliables. Il y a ce côté aventure que nous procure l’adrénaline et le stress de ne pas se faire prendre, puis cet autre côté plus historique lorsque nous tombons sur des traces de notre passé souvent méconnues aujourd’hui.

4/ Le voyage fait-il parti de ton art de vivre ?

Évidemment ! Pendant longtemps, je pensais que le voyage ne pouvait se faire que sous le schéma classique : Prendre l’avion pour débarquer dans un pays dont je ne comprends pas la langue. Mais au fur et à mesure de mes expéditions en Belgique, j’ai compris que le voyage commence à deux pas de la maison.. Il suffit d’ouvrir les yeux, de ranger ses écrans et de découvrir nos régions. Le voyage, pour moi, est un état d’esprit et pas un moment ou un lieu.

5/ Ton objectif préféré, celui que tu emmènes partout ?

L’objectif que j’embarque tout le temps est le 16-55mm f/2.8. Pas très original, je sais. Mais c’est l’objectif avec lequel je fais le plus d’images, en ville comme en dehors. Je l'accompagne très souvent du 50-140mm pour pouvoir capturer des détails de plus loin. Mais lorsque je veux partir léger, c’est le X100V qui me suit. Tu l’auras compris, le matériel dépend un peu de mes humeurs.

6/ Ton plus beau souvenir photographique ?

Mon plus beau souvenir est, du point de vue photographique, assez frustrant. J’ai commencé à m’intéresser à la photographie de paysage vers 2015 / 2016 et je suis rapidement tombé sur le travail de Sebastiao Salgado. Je me suis senti happé par la force et le côté humain de ses images. Lorsque j’ai appris qu’il exposait à Bruxelles, pour la sortie de son projet Kuweit, j’ai évidemment voulu y aller. Il était présent le jour du vernissage et j’ai pu lui parler un instant. Pendant tout le trajet jusqu’à l’exposition, je rêvais de réaliser un portrait de lui, en noir et blanc bien-sûr ! Je n’avais pas embarqué d’appareil photo avec moi car, après tout, qui prend son appareil photo pour visiter une expo ? Pendant ces quelques instants avec lui, j’ai passé mon temps à me dire “M****, si j’avais su..”. Aujourd’hui, ce souvenir d’une photo inexistante est mon plus beau souvenir photographique.

7/ Comment vendre du paysage ?

Très bonne question ! Je ne suis pas le mieux placé pour y répondre, étant donné que je ne génère aucun revenu de mon travail de photographe de paysage. Mais, pour commencer à en vendre, j’imagine que les tirages et les livres sont un début de solution ? Il reste la piste des formations également mais je n’en suis pas fan du tout.

8/ Tu as, entre autre comme partenaire Fujifilm, en quoi cela a changé ta vie de photographe ?

Je mets un point d’honneur à distinguer ma vie de photographe de celle de Youtuber. Les collaborations que j’ai avec les différentes marques, Fujifilm entre autres, m’ont permis de tester pas mal de matériels différents. D’un point de vue de photographe, l’avantage est que je peux tester le matériel avant de l’acheter. Pour le reste de la collaboration, elle est tournée essentiellement vers mon côté Youtuber (mise en avant de nouveautés, création de tutos, explication d’une fonctionnalité,..).

9/ Qu’est ce qui t’a motivé à créer une chaine YouTube ?

Lorsque j’ai commencé la chaîne en 2015, il n’y avait que très peu de vidéos francophones abordant le monde de la photo et de la vidéo. Avec un ami de l’époque, nous nous sommes donc dit “Pourquoi pas ?”. Au départ, c’est donc sur un coup de tête et un rêve de gosse que Les Eleveurs de Pixels a été créé. Huit ans plus tard, et après quelques changements de direction, je suis très heureux d’avoir eu ce coup de tête. Même si aujourd’hui, il existe des dizaines d’autres chaînes !

10/ Sur ta chaine tu testes beaucoup de matériel mais pas que, tu nous guides sur Ligthroom et tu nous partages ta vie de photographe au travers de ton expérience. Faire ces vidéos te prend-il beaucoup de temps ?

Donner une moyenne d’heures de travail serait trompeur. Il y a des vidéos que je réalise très rapidement (entre 5 et 6 heures) à partir du moment où l’idée me vient jusqu’au moment où la vidéo est publiée. D’autres projets peuvent prendre des centaines d’heures de travail. Si je prends ma dernière vidéo “Pourquoi j’ai arrêté la photo de mariage”, elle m’a demandé 4-5h de travail car je savais ce que j’avais à dire, j’ai tourné le facecam d’une traite et le montage est quasi inexistant. Au contraire, une vidéo comme “Cinq jours de photos en Suisse” m’a demandé des centaines d’heures de travail car il faut d’abord faire une liste des lieux à visiter, aller sur place, filmer et prendre des photos, développer les photos et monter la vidéo et finir par la diffuser. Le plus frustrant, c’est que les vidéos qui me demandent le moins de temps de réalisation sont souvent celles qui attirent le plus de vues !

11/ Que t’a apporté YouTube ?

A titre professionnel, ça m’a apporté un carnet d’adresse assez important. Je suis rentré en contact avec beaucoup de photographes, de représentant de marques, de guide touristique,... tandis qu’à titre personnel, me retrouver devant une caméra et deux lumières m’a appris à être plus à l’aise dans ma diction et dans ma relation aux autres. Je l’ai toujours dit dans mes vidéos, je suis assez introverti de base. Youtube a complètement changé la donne !

12/ Comment vois-tu le futur de la photographie ?

Je ne prendrai pas trop de risques en disant que l’IA va prendre beaucoup de place dans la photographie. Sans doute pas via des logiciels de création tels que MidJourney ou Dall-E mais l’IA va venir s’installer dans nos boîtiers et dans nos logiciels. C’est d’ailleurs déjà le cas au travers de la reconnaissance des yeux (boîtier) ou la reconnaissance des sujets dans Lightroom par exemple.

13/ Qu’est ce qui te fait encore vibrer en photographie ?

Je te l’ai dit plus haut mais, au final, la photographie n’est pas mon but final. Elle ne fait que me pousser à découvrir des endroits, des situations que je ne ferais jamais sans l’excuse de la photo. Ce qui me fait le plus vibrer, c’est d’assister à des lumières irréelles : Un lever/coucher de soleil, une éclaircie au travers d’un orage, un reflet dans une flaque,.. Ce sont tous ces moments-là qui me font vibrer.

14/ Des projets pour fin 2023, livre, expo ?

Beaucoup de projets ! Mais je n’aime pas trop parler de ce que je vais faire, je préfère en parler quand c’est fait. Ne pas vendre la peau de l’ours.. Mais évidemment, continuer à sortir des vidéos et continuer à travailler sur mon projet de Charleroi, vu de ses terrils

15/ un conseil à donner aux futurs photographes ?

Mon conseil est le même depuis des années, sors et prends des photos. Ne vous prenez pas trop la tête avec la technique, travaillez votre vision, vos compositions, votre motivation. Et surtout, n’oubliez pas que tout est possible.

On peut voir son travail sur : @pierre_boisseaux @pierre boisseaux